« 27 septembre 1765.
Je soussigné Charles Jaladon, maître et démonstrateur de chirurgie, lieutenant de M. le premier chirurgien
du Roi, chirurgien major du régiment de Riom, membre de l'académie des sciences et arts de
cette ville de Clermont-Ferrand, certifions qu'en vertu de l'ordonnance de Mgr de Ballainvilliers, intendant
de la province d'Auvergne, me suis transporté en son hôtel à l'effet d'y voir et visiter la bête féroce qui a
fait tant de ravages dans le Gévaudan et les montagnes de l'Auvergne. A laquelle j'ai remarqué les cicatrices
et plaies dont il sera fait mention ci-après, et l'ayant faite transporter chez moi j'ai fait les plus
exactes perquisitions sur toutes les parties de son corps en présence de Maître Benoît du Vernin, docteur
en médecine et doyen de son collège, et de Maître François Fargeon, maître en chirurgie, prévôt de sa
compagnie, J.-B. Raymond, aussi maître et démonstrateur en chirurgie, qui ont la bonté de m'aider à l'examen
et dissection dudit animal après lesquelles perquisitions il résulte les remarques suivantes :
- 1° « Que l'animal commençait à tomber en putréfaction, ce qui se manifestait par l'odeur, la chute du poil
et de l'épiderme.
- 2° « Une cicatrice à la face interne de l'épaule droite qui pénétrait jusqu'au muscle.
- 3° « Plusieurs cicatrices aux deux poignets ou à la partie antérieure inférieure des jambes de devant.
- 4° « Deux trous situés à la partie postérieure des deux cuisses qui paraissent avoir été faits par une balle.
- 5° « Un coup qui a percé le globe de l'oeil droit, pénétré dans la tête, et a fracturé les os de la base du crâne
et a procuré la mort de l'animal, lequel coup paraît avoir été fait par une balle.
- 6° « Une cicatrice derrière l'oreille gauche.
- 7° « Une autre cicatrice pénétrante obliquement dans les chairs à la partie moyenne antérieure de l'épaule
droite.
- 8° « La peau percée en différents endroits par de gros plombs ou chevrotines surtout dans le flanc gauche.
- 9° « Plusieurs plombs de différentes grosseurs se sont trouvés dans les différentes parties inférieures de
cet animal.
- 10° « Les muscles du col de lombe du dos et de la mâchoire inférieure sont des masses de chair d'une force
bien au-dessus des loups ordinaires, toutes les autres proportions sont aussi plus considérables que dans
cette espèce d'animaux.
- 11° « Après avoir enlevé les téguments, les graisses et les parties musculeuses déjà sphacelées (cf :
les Anecdotes ) j'ai
desséché les parties charnues avec la liqueur indiquée par M. de Buffon, ensuite, avec l'esprit de térébenthine
j'ai placé dans l'interstice des muscles les poudres et les baumes dont on se sert dans les embaumements, les
capacités sont remplies de poudres odorantes et baumes balsamiques, sel pénétrant de toutes les parties
extérieures matelassées avec la même poudre par-dessus le lignement ordinaire, le tout couvert de sa peau...
- 12° « La peau de cet animal a été si fatiguée que tout son long poil est tombé, la partie qui recouvre
l'abdomen surtout s'est dépouillée de l'épiderme ainsi que quelques parties de la peau, suite de la
mortification.
- 13° « Toutes les autres proportions ont diminué de volume par le dessèchement, c'est ce qu'on peut remarquer
par la table suivante:
« Proportion du temps que j'ai pris.
- Longueur depuis le bout du nez jusqu'à l'extrémité de la queue : 5 pieds, 10 pouces, 6 lignes (après
désèchement : 5 pieds, 9 pouces, 4 lignes)
- Longueur depuis le bout du nez jusqu'à la naissance de la queue : 4 pieds, 5 pouces, 1 ligne (après
désèchement : 4 pieds, 4 pouces)
- Longueur depuis le bout du nez jusqu'à l'occiput : 1 pied, 1 pouce (idem après désèchement)
- Longueur du pied de derrière : 2 pouces 9 lignes (après désèchement : 2 pouces, 6 lignes)
- Longueur du pied de devant : 2 pouces, 11 lignes (après désèchement : 2 pouces, 9 lignes)
- Longueur du plus gros onglon : 1 pouce, 1 ligne (idem après désèchement)
- Longueur des dents caninces ou défenses : 1 pouce, 3 lignes (idem après désèchement)
« Nombre de dents:
- 1° « A la mâchoire supérieure dix-huit, savoir six incisives, deux défensives et dix molaires, six du
côté droit et quatre du côté gauche, et une prête à percer du même côté.
- 2° « A la mâchoire inférieure vingt-deux, savoir six incisives, deux canines ou défensives, et quatre
molaires. Il y en a sept à chaque côté.
« Le présent procès-verbal est sincère et véritable, en foi de quoi j'ai signé avec les ci-dessus nommés, à
Clermont-Ferrand le 27 septembre 1765. J. D. F. R. »
(A.D. P.-de-D. c. 1736).
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